Elle se fait appeler Eden et sur son site, le message de cette courtisane ne peut être plus clair : Eden, aide à l’éveil sensuel et sexuel. La particularité de cette trentenaire fort sympathique est qu’elle offre notamment ses services auprès des personnes en situation de handicap. « J’adore ce que je fais, dit-elle, je suis quelqu’un qui aide, c’est ça qui me nourrit. »

Disons-le, elles sont rares les travailleuses du sexe qui ont cette spécialité, cela dit entre guillemets. Elle exerce son métier depuis 2015, et c’est sa business, elle gère elle-même ses horaires de travail en fonction de sa clientèle, et elle sait bien sûr s’adapter aux besoins des gens qui font appel à ses services. « J’ai beaucoup d’écoute et ça ne fait pas partie de ma job, je dirais que ça fait partie de moi d’abord et avant tout, depuis toujours. Le travail du sexe, que ce soit avec des personnes avec un handicap ou pas, c’est du travail du sexe. Mais je dirais que ça me permet d’être mieux acceptée lorsque je dis que je fais ce travail pour des personnes en situation d’handicaps. Souvent, on me félicite, on me dit que c’est beau ce que je fais. On me demande même parfois : « Comment tu fais? » Mais moi, je n’ai pas la barrière du handicap, sauf que je ne travaille pas du tout avec des gens qui ont un handicap mental, parce que je n’ai pas de formation en ce domaine. Cela dit, je vois d’abord la personne avant tout le reste, que ce soit un homme ou une femme. »

Ce travail qu’elle accomplit est un choix. « Quand on est adulte et qu’on est conscient de ce que l’on peut faire et ne pas faire, on choisit ». Force est d’admettre aussi que ce ne sont pas toutes les travailleuses du sexe qui acceptent de voir des clients qui sont en situation d’handicap.

« L’un des premiers commentaires d’un client que j’ai eu sur mon site, quand j’ai commencé en 2015, a été de me faire qualifier d’ovni dans le milieu! (parce que le client a trouvé son expérience incroyable !) », ajoute-t-elle.

Eden habite dans la région de Montréal, et elle compte sur une clientèle fidèle qui l’amène parfois à voyager un peu partout au Québec. « Je suis déjà allée aux Îles-de-la-Madeleine avec un client avec handicap, et j’ai fait sa préposée le temps du séjour, dit-elle. C’était nice, j’ai découvert les Îles vues par un Madelinot en plus, c’était cool. »

Le mot qui revient le plus souvent dans la bouche de ses clients avec handicaps est tout simple: « Merci ». « Il arrive qu’une personne me dise qu’elle a passé le plus beau moment de sa vie. C’est gratifiant, mais personnellement, je ne me sens pas dépendante de mon travail, bien que je vis grâce à ça, mais je ne veux pas me sentir dépendante de cet amour qu’on me donne parce qu’ils sont contents.

 

Il faut arriver à faire la part des choses, à la fois côté professionnel et côté perso. Comme ce sont des gens qui ne sont pas toujours forcément considérés comme des humains à part entière, ça m’est arrivé d’en rencontrer qui étaient amoureux de moi, mais j’essaie de rester droite et de poser mes limites, et d’expliquer que c’est un service qui est rendu. Pendant ce moment-là, c’est en quelque sorte la « girlfriend experience », mais ensuite, c’est sûr que je ne lui écrirai pas pour lui demander quand je vais le revoir. »


À spécifier : Eden ne se veut pas porte-parole des tds (travailleurs du sexe), elle a accepté de nous parler de son expérience et de ses choix de vie qui n’engagent qu’elle. Un ou une tds qui n’accepte pas de clientèle avec un handicap n’est évidemment pas une mauvaise tds, c’est une personne qui connait tout simplement ses limites.

On s’imagine bien qu’Eden a souvent constitué, pour plusieurs clients, une toute première expérience sexuelle. Pour plusieurs d’entre eux, elle a constaté que cela leur faisait un bien immense et que ce moment d’intimité pouvait même avoir un impact sur leur caractère et leur bien-être. « Totalement! Je leur demande comment ils se sentent après notre rencontre, et je constate chez des clients réguliers, d’une fois à l’autre, que ça leur fait un bien immense. Un rendez-vous dure une heure, mais ça ne se termine pas en réalité au bout d’une heure parce que les effets se poursuivent. Souvent, les personnes ressentent les effets de notre rencontre durant deux ou trois jours, me dit-on, et il y en a un qui m’a dit qu’il s’était senti super bien durant une semaine. »

Le sujet demeure quand même tabou, et ce ne sont pas tous les proches de personnes handicapées qui réalisent que la sexualité peut changer bien des choses.
« J’ai déjà vu des gens, ou de la famille, qui étaient près de personnes en situation de handicap et lorsqu’elles montraient un certain intérêt pour la sexualité ou un besoin d’affection, ce n’était clairement pas établi comme une priorité. Mais si, ça fait partie des besoins! Certains souffrent d’ataxie, de dystrophie musculaire, de paralysie cérébrale, tout ce qui est dysfonction neurologique. »

Évidemment qu’Eden est rémunérée pour les services qu’elle offre, et elle est à même de constater qu’elle fait du bien à ces personnes qui n’ont pas nécessairement une vie sexuelle active. De la satisfaction, du plaisir, le bonheur de se faire caresser le bras, par exemple, compte assurément parmi les bienfaits dont bénéficient ses clients.
« C’est du travail, bien sûr, mais il y a l’aspect humain qui est important aussi. C’est comme les préposés et les infirmières, il y a toujours un côté humain derrière ce qu’ils font, et moi je l’ai, cet aspect-là. » Pour exercer son métier auprès de sa clientèle cible, Eden s’est ouverte à des réalités et à des moments comme elle ne croyait pas d’abord le faire, afin de pouvoir s’adapter à ceux et celles qui font appel à ses services. Évidemment, on s’entend qu’il y a plein de gens avec qui elle n’aurait jamais de relations dans sa vie personnelle, mais c’est là qu’il est important de faire la distinction entre le travail et la vie au quotidien. Somme toute comme dans n’importe quel autre métier.

Bien sûr qu’il y a beaucoup d’hypocrisie autour du métier qu’elle exerce. « D’un côté, on dit que le travail du sexe, ce n’est pas bien, mais lorsqu’il est question d’assistance sexuelle auprès des handicapés, alors là c’est autre chose. On dit que c’est un beau service, une bonne chose, mais au fond, c’est la même chose, c’est simplement que le travail est orienté vers un type de clientèle particulière. »

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