Une comédie musicale qui s’annonce comme un grand succès

On entend le bonheur et la satisfaction dans la voix de Serge Denoncourt lorsqu’il confie tout de go que monter une version québécoise de la mythique comédie musicale Hair représentait un rêve pour lui. « C’est une musique qui me suit depuis que j’ai à peu près cinq ans, que j’aimais enfant, que j’ai aimé adolescent, et que j’aime encore aujourd’hui » dit-il.

Il signe donc non seulement la mise en scène et la direction artistique de Hair, mais il en a aussi fait l’adaptation. « J’avais beaucoup envie de mettre ça en scène. Annie, par exemple, c’est super le fun, mais ce n’est pas une musique que l’on connait tant, on connait une chanson ou deux. Mais avec Hair, il y a plein de chansons que l’on connait, c’est le party, la fête, c’est les années 1970. Et j’avais envie de faire l’adaptation parce que je voulais que ce monde-là parle comme les hippies québécois. Il y a une adaptation française qui ne marche pas du tout, alors ça me permet, en ayant décidé de la faire moi-même, de garder le contrôle sur ce que j’ai envie de faire. »

« Je vais te dire une grosse phrase et tu peux l’écrire, confie Serge. J’ai vu le show en 2009 à Broadway, et mon casting, qui a été vraiment choisi sur audition par-dessus audition, je te jure qu’il est meilleur ». Parmi les noms connus qui sont de la distribution, notons Philippe Touzel, Éléonore Lagacé, Nico Archambault, Tom-Eliot Girard, mais Serge s’empresse de préciser : « Oui, il y en a qui ont de l’expérience, et il y a aussi le monde pas connu, qui n’ont juste pas eu la chance. Ils ont étudié là-dedans, ils chantent, ils dansent, ils jouent, et je suis vraiment très impressionné et très content de travailler avec eux. Je vais avoir le show que je veux, on ne fait pas de compromis parce qu’on est au Québec, on a tout ce qu’il faut. S’il y a du monde qui ont vu Hair sur Broadway, ils peuvent venir le voir, je n’ai aucun complexe. »

Beaucoup de monde sur scène pour un gros party

Déjà, la bande-annonce de Hair dévoilée il y a quelques semaines, avec les interprètes qui nous livrent Let the Sunshine In, nous a mis en appétit et suscité un vif intérêt. Des supplémentaires ont d’ailleurs été annoncées pour ce spectacle qui sera présenté à Montréal, puis à Québec en décembre. Plus de trente artistes et musiciens seront sur scène, et j’ai demandé à Serge Denoncourt quelle était sa chanson préférée du spectacle. « Oh, c’est compliqué… mais la mienne, c’est Aquarius, qui est la première du show. Quand cette toune-là part, j’ai des frissons, j’ai quasiment les larmes aux yeux, ça me fait plaisir depuis toujours, je capote sur cette chanson », confie Serge, qui a lui-même proposé de monter Hair à Juste pour rire, où l’on désirait de nouveau travailler avec lui. « On m’a dit que ce n’était pas drôle, ce à quoi j’ai répondu que oui, c’était très drôle. La chose importante à savoir est qu’il y a un film qui a été fait dans les années 1980, et ce n’est pas du tout ça. Le film est beaucoup plus dramatique, alors que la comédie musicale est très drôle, c’est comme un happening dans un théâtre où l’on parle au public, et on fait interagir les spectateurs à la gang de hippies qui squatte un théâtre. Dans le spectacle, l’histoire est très simple, ce sont des hippies qui nous racontent chacun leur p’tit bout de vie, et le deux tiers du show, c’est le gros party on stage et dans la salle. »

À écouter parler Serge Denoncourt, il est clair que cette production s’adresse à tous les spectateurs, pas seulement à ceux qui connaissent déjà Hair. « C’est sûr que les gens qui ont connu les années 1970 vont avoir le goût de venir voir ça et de rire, et d’avoir des souvenirs. Et j’espère qu’ils vont venir avec des jeunes, pour leur dire : « Peux-tu croire qu’on a déjà été comme ça? » Souvent, les jeunes pensent qu’on est nés vieux! Il y a une génération qui a voulu faire la révolution, qui a voulu tout changer, et les plus jeunes ont de la misère à croire ça. Je pense que ça peut ouvrir de belles discussions familiales avec des grands-pères avec leurs petits-enfants, ou des parents avec leurs enfants. J’espère qu’il y aura beaucoup de jeunes dans la salle, et s’ils sont nombreux, je suis sûr qu’ils vont triper », dit-il.

Des plans pour l’Europe

A-t-il l’intention de présenter éventuellement Hair en Europe? « C’est une bonne question, et la réponse est oui. Je ne te nommerai pas de nom, mais il y a des producteurs européens qui vont venir voir le show. Ils sont déjà intéressés parce qu’ils me connaissent en Europe, et il y a une envie d’aller le présenter en Europe, parce que je trouve qu’on est les meilleurs pour monter ça, parce que c’est américain. Et on comprend plus l’américanité que les Français. »

Serge Denoncourt n’est effectivement pas un inconnu outre-mer, il a notamment été concepteur et metteur en scène pour le spectacle d’Arturo Brachetti, il a fait la mise en scène du spectacle musical Bernadette de Lourdes, et a été auteur du livret et metteur en scène de Je vais t’aimer, une comédie musicale avec les chansons de Michel Sardou. « Pour les Français, et ça me fait rire, j’ai une étiquette de metteur en scène à l’américaine avec une french touch. »

Diplômé en option théâtre au Cégep Lionel-Groulx en 1987, Denoncourt s’est depuis longtemps imposé comme l’un des plus brillants metteurs en scène de sa génération. Il œuvre autant au Québec que sur la scène internationale, et on ne compte plus le nombre en scènes de pièces et de spectacles sur lesquels il a travaillé, en plus d’avoir aussi agi à titre d’auteur et de concepteur sur plusieurs spectacles. Parmi ses faits d’armes, citons simplement quelques titres: Cyrano de Bergerac, Qui a peur de Virginia Wolf? Believe – Criss Angel (pour Le Cirque du Soleil à Las Vegas), Roméo et Juliette, La mort d’un commis-voyageur, Les choristes, Révolution en tournée, Mademoiselle Julie et Annie, à l’été 2022. Et dire que Serge souhaitait étudier en médecine lorsqu’il était jeune!

Un métier découvert par hasard

« Je n’ai pas touché du tout à la médecine, mais c’est ce que je voulais faire. J’ai une amie qui voulait passer ses auditions dans une école de théâtre, et elle m’a demandé de lui donner la réplique, ce que j’ai fait. Dans toutes les écoles, on me demandait : « Toi, ça ne t’intéresse pas? » Ce n’était pas mon plan, mais après avoir fait trois écoles, je me suis dit que j’allais essayer, et ça été un gros coup de foudre. »

Le comédien en lui n’éprouve pas de frustration de ne plus jouer – il a fait du théâtre (il a joué aux côtés de Janine Sutto dans Harold et Maude), du cinéma et joué à la télévision –, puisqu’il confie qu’il n’a jamais aimé ça. « Il n’y avait pas d’école de mise en scène, et j’ai compris vite que c’était ce que je voulais faire. J’ai fait mon cours comme acteur, ça allait super bien, mais je n’aimais pas, entre autres, écouter les ordres des metteurs en scène. Je fais le métier que je voulais, c’est arrivé quand même rapidement, j’avais vingt-quatre ans j’étais au Quat’Sous. Je n’avais plus besoin de jouer, je pouvais gagner ma vie comme metteur en scène. »

Et sa vie comme metteur en scène, ce n’est pas un secret qu’il la gagne très bien et qu’il est très sollicité, et le tout se fait avec un plaisir évident. « J’ai 61 ans depuis pas longtemps, et il n’y a pas un matin, en quarante ans de carrière, où je me suis dit que ça ne me tentait pas d’aller répéter. Quand je suis dans une salle de répétition, je suis comme un poisson dans un aquarium. J’aime être avec les acteurs, avec les chanteurs, j’aime inventer un univers, j’aime les diriger. Ça explique peut-être pourquoi j’en fais depuis si longtemps et que j’en fais encore. Je ne pense pas, quand on voit mes shows, qu’on se dit que je suis tanné et que je fais la même affaire. Je pense que ça parait que j’ai une passion pour mon métier », ajoute-t-il.

 

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