Je vous salue salope !

 

Le titre de ce film peut paraître brutal et choquant, mais ce n’est rien comparé à son contenu. Réalisé par Léa Clermont-Dion et Guylaine Maroist, Je vous salue salope risque de secouer l’auditoire face au fléau de la « cyberviolence », nouvelle arme pour faire taire les femmes. Surtout celles qui ont du pouvoir. Construit comme un thriller, ce bouleversant documentaire nous plonge dans le quotidien de quatre femmes et un homme qui sont tous, de différentes manières, victimes de cyberharcèlement, crime de l’ère moderne dont les auteurs sont rarement punis.

 

 

Les deux cinéastes québécoises ont suivi Laura Boldrini, la femme la plus harcelée d’Italie; Marion Séclin, youtubeuse et comédienne parisienne qui a reçu 40 000 menaces de viol et de mort; Kiah Morris, ex-représentante démocrate au Vermont, forcée de démissionner et de déménager après avoir été menacée en ligne par des membres de l’extrême droite; Laurence Gratton, une jeune enseignante québécoise traquée par un collègue de classe; et Glen Canning, le père de Rehtaeh Parsons, une malheureuse jeune fille de la Nouvelle-Écosse violée par quatre élèves de son école. Les images du crime se sont propagées ensuite sur la toile jusqu’à en devenir virales. Deux crimes odieux qui ont conduit Rehtaeh au suicide. Elle avait 15 ans.

« J’ai eu l’idée de faire ce film parce que j’ai aussi reçu des menaces en ligne, affirme la jeune autrice féministe Léa Clermon-Dion. Je me suis rendu compte que je n’étais pas la seule et que c’était la pointe de l’iceberg :  on assiste à une montée terrifiante et fulgurante la misogynie en ligne. Il faut que le public en prenne conscience. »

 

 

 

 

Les deux coréalisatrices ont travaillé 5 ans sur ce film, passant plus d’une centaine d’heures avec chaque protagoniste. Les tournages se sont déroulés à Rome, Paris, Bennington (Vermont), Montréal et Toronto. Les images et les propos qu’elles en ont tirés sont durs et crus. Il n’est pas question ici de fiction, c’est du réel livré très souvent, en temps réel! 

 

Menaces de mort, de viol, de lynchage, les scènes sont, tantôt touchantes, tantôt révoltantes comme celle où la politicienne noire Kiah Morris est interrompue lors d’une conférence de presse par son harceleur, Max Misch, suprémaciste-blanc qui la traque sur les réseaux sociaux. Cette scène est à glacer le sang.

 

 

Les deux cinéastes sont aussi allées en Californie pour filmer Donna Zuckerberg, la sœur du fondateur de Facebook. « L’internet a permis la propagation de la misogynie affirme la spécialiste américaine de sa résidence à Palo Alto, dans la Silicon Valley. C’est un flux constant de haine qui rappelle aux femmes qu’elles n’auront jamais de repos. »

Comment ces femmes qui se sont livrées à cœur ouvert ont-elles réagi au film? « Elles sont toutes immensément touchées, affirme Guylaine Maroist. Souvent, les gens croient à tort que la cyberviolence est virtuelle. Avec ce film, Léa et moi avons voulu montrer qu’elle est bien réelle et qu’elle a un impact énorme dans la vie des femmes. L’enjeu est de taille : il s’agit de la liberté d’expression des femmes. »

Je vous salue salope est à l’affiche de nos salles de cinéma.

SalopeLeFilm.com

 

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