Entre Ciel et Mer : Un conte acrobatique.

Le cirque Eloize affiche ses origines.

Il existe, dans les eaux salées du Golfe du Saint-Laurent, un archipel sablonneux bercé par la mer et fouetté constamment par les vents au caractère typique acadien : Les Îles-la-Madeleine. À plus de 128 km à vol d’oiseau de l’Île du Prince-Édouard, les habitants, fiers et tenaces, ont su garder scrupuleusement leur culture et leurs racines. Ce coin de paradis, havre aux mille et une couleurs, nous offre une histoire riche et généreuse.

Lorsque de grands artistes se rencontrent, la somme des parties en résulte à des moments inoubliables.

En 2021, lors d’un arrêt aux Îles, le cofondateur du Cirque Éloize Jeannot Painchaud assiste à une performance du conteur Cédric Landry. Le charme créatif s’opère : de fil en aiguille, de rencontre en rencontre, l’idée d’Entre Ciel et Mer prend vie. Après s’être joint au célèbre groupe Suroît, les maîtres incontestés de la musique traditionnelle aux racines acadiennes, c’est dans l’église de Havre-Aubert, petit bourg de 2 100 habitants de la pointe sud des Îles-de-la-Madeleine qu’on verra la première représentation de ce spectacle unique un an plus tard. Ils nous offrent maintenant cette création flamboyante à la Place des Arts de Montréal en novembre prochain.

Il nous faut cependant revenir en arrière et comprendre le cheminement exceptionnel et les qualités de chacun des artisans de cette magnifique œuvre.

Il y a 30 ans aux Îles-de-la-Madeleine, en 1993 très exactement, Jeannot Painchaud, Daniel Cyr et Claudette Morin décident de marier les arts du cirque à la musique, à la danse, à la poésie, au théâtre et de l’associer à une technologie avancée. Le cirque contemporain voit naître un pionnier : le Cirque Éloize. Ce nom, qui en patois acadien veut dire « éclair de chaleur », représente très bien cet amalgame du côté électrisant acrobatique et spectaculaire de la troupe avec la chaleur de l’humanité qui jaillit à chacune des performances. Éloize sied à merveille à la bande madelinienne.

Bien que Jeannot, globe-trotteur invétéré, présente les spectacles du cirque dans plus de 600 villes, à plus de 5 millions de spectateurs, le cœur du madelinot n’est jamais loin de son île natale.

Cédric Landry est quant à lui un conteur émérite aux paroles enchanteresses qui a toujours su naviguer au rythme des mots, avec la saveur unique de l’archipel bien ancré au cœur du golfe du Saint-Laurent. Celui qui nous a offert La light du Borgot qui a été présenté dans la francophonie canadienne et en France, vous offre un art qui louvoie entre le rêve et la réalité, vous transportant dans son univers poétique. La rencontre entre Jeannot et Cédric donnera naissance à un spectacle unique.

Bien que Entre Ciel et Mer était déjà voué au succès, les auteurs ont ajouté une corde à leur arc : la musique du Groupe Suroît, eux aussi originaires des Îles. Groupe formé en 1977 lorsque Bertrand et Pierrot Desraspe se joignent à Alcide Painchaud et nous offrent un premier album nommé simplement Suroît. Le groupe est maintenant composé de Henri Paul Bédard, Félix Leblanc et Simon-Charles Cyr. Leur musique, liée étroitement à leurs origines acadiennes, propose un mélange de folk, de bluegrass, de blues et celtique. Un assemblage explosif qui nous fait bondir de notre siège. De la dynamite musicale.

Aux Îles la ligne d’horizon est le point de rencontre du ciel et de la mer. Cette ligne sépare le monde réel de celui de l’imaginaire. Tel un acrobate, le spectateur sera invité à marcher sur cette ligne et basculer d’un univers à l’autre. Cette revue unique en son genre est l’amalgame parfait entre le conte, le cirque et la musique et célèbre fièrement les identités culturelles acadiennes et québécoises. Les artistes, plus talentueux les uns que les autres, nous proposent des prestations de tissus et cerceau aérien, de mât chinois, de monocycle, de jongleries, de roue cyr et d’équilibres sur cannes. La mise en scène de Michel Maxime Legault est tout simplement majestueuses. Un délice pour l’âme et le cœur.

Entre Ciel et Mer est un manifeste heureux où résonne d’outre atlantique la culture acadienne et québécoise portée par une langue française façonnée par les légendes, l’histoire, les rencontres et quatre cents ans d’histoire. La résonnance de l’accent québécois et ses expressions flottent et pirouettent avec le langage musical et acrobatique. Dans le texte, avec poésie et simplicité, l’histoire porte une réflexion sur notre identité, notre humanité, nos origines et sur les choix qui s’offrent à nous. Pendant plus de 75 minutes, vous serez transporté dans des histoires insulaires qui vivent aux îles depuis des générations et qui reviennent enrichir le passé au son de la mer.