Par la Dre Andreea Bosneaga, MD, FRCPC, Médecin en chef Nature Médic, Clinique spécialisée en douleur chronique et cannabis médical

J’aimerais premièrement me présenter et partager avec vous mon histoire en tant que professionnelle de la santé et en tant que patiente souffrant de douleur chronique.

Je suis anesthésiologiste spécialisée et une authentique passionnée de la gestion de la douleur chronique. En 2015, j’ai terminé ma spécialisation à l’Université de Sherbrooke du Québec. De 2015 à 2019, j’ai pratiqué au Nouveau-Brunswick, où j’ai complété ma spécialisation en douleur chronique et en cannabis médical, principalement auprès de Dr Richard Dumais, une sommité bien reconnue dans son domaine. Je suis d’ailleurs le médecin fondateur de la première clinique de douleur multidisciplinaire du Nord du Nouveau-Brunswick, qui a pu accueillir ses premiers patients en 2016. Je suis également le médecin fondateur et médecin en chef à Nature Médic, une clinique spécialisée, hors établissement mais affilié à la RAMQ, offrant une prise en charge pour la gestion de la douleur chronique et le cannabis médical, la première clinique médicale en ce genre au Québec.

Présentement, toute l’attention est centrée sur la pandémie actuelle… mais saviez-vous que la douleur chronique est une autre pandémie, beaucoup plus silencieuse, qui touche une personne sur trois au Québec? Ces patients représentent une population très vulnérable parce qu’ils demeurent invisibles: leurs problèmes douloureux sont souvent mal compris et même jugés parfois. Plusieurs intervenants de première ligne sont souvent dépassés par les difficultés, le temps et l’énergie que représente une bonne prise en charge globale de ces patients. En milieu hospitalier, dû au manque criant de ressources, les patients avec des problèmes de douleur complexes peuvent attendre plus de 24 mois avant d’être pris en charge! Pourtant, la majorité de ces patients n’ont besoin que de conseils d’experts, incluant un plan de traitement et un programme de réadaptation, ajustés à leurs besoins, d’où l’importance d’une clinique multidisciplinaire avec une approche multimodale*.
À l’hiver 2017, pendant l’exercice de mes fonctions d’anesthésiste, je me suis blessée au dos suite à des transferts répétés de patients. Le diagnostic est tombé : hernie discale lombaire! Malgré mon assiduité continue au travail comme professionnelle de la santé, j’ai longtemps été une patiente souffrant en silence, et qui en parallèle de ses responsabilités professionnelles, essayait désespérément de prendre le contrôle de ses propres douleurs. Comme bien de mes patients, j’ai fait l’essai d’un nombre incalculable de traitements pharmacologiques dits « usuels », de 1eres et de 2e lignes, tel que : Elavil (amytriptiline), Lyrica (pregabalin), Neurontin (gabapentin), Lamictal (lamotrigine), Flexeril (cyclobenzaprine), Tramadol, Cesamet (nabilone), Cymbalta (duloxetine) et divers anti-inflammatoires. Malheureusement, j’ai rapidement constaté que je faisais partie des patients qui développent des effets secondaires importants à la médication dite « usuelle ». Dans ma situation, en plus de m’empêcher de fonctionner et me mettre à risque de commettre des erreurs médicales graves, la médication ne m’aidait que très légèrement au niveau des douleurs. À cette époque, je prescrivais déjà le cannabis médical dans ma pratique en clinique de douleur. J’ai donc dû me résoudre à l’essayer comme traitement de « dernier recours ». Quelle ne fut ma surprise de constater que, grâce au cannabis médical, non seulement ma douleur était progressivement devenue tolérable, me permettant de reprendre une vie « normale », mais aussi que je n’avais pas d’effets secondaires!

Plusieurs années plus tard, ma douleur est toujours bien contrôlée et je mène une vie personnelle et professionnelle plus que satisfaisante. Je prescris encore régulièrement le cannabis thérapeutique dans ma pratique médicale au sein d’un plan de traitement multimodal. Je constate malheureusement trop souvent, que le cannabis médical est encore très stigmatisé et ce malgré qu’il n’ait plus rien à voir avec ses débuts dans les années 2000, où l’on prescrivait du cannabis séché à haute teneur en THC afin que les patients le fument. Les produits dérivés, comestibles et huiles à haute teneur en CBD ont fait leur apparition il y a plusieurs années déjà afin d’en augmenter son efficacité et sa sécurité. On peut l’utiliser seul ou combiné à d’autres traitements pour soulager la douleur reliée à l’arthrose, les maladies inflammatoires, les douleurs neuropathiques ou reliées au cancer, tout en optimisant le sommeil et les symptômes anxio-dépressifs qui accompagnent trop souvent la douleur chronique.

Finalement, je crois sincèrement que cette plante naturelle gagne à être connue en traitement multimodal et non seulement comme dernier recours. Toutefois, afin de maximiser son efficacité et minimiser les effets indésirables potentiels, un accompagnement par un professionnel de la santé qualifié est fortement recommandé.

* Un traitement multimodal est une combinaison de différents traitements pharmacologiques (médicaments, cannabis médical), non pharmacologiques (physiothérapie, psychothérapie, yoga, etc) et/ou interventionnels (infiltrations) qui ciblent différents mécanismes d’action et qui est prouvé étant l’approche la plus efficace pour une bonne prise en charge de la douleur chronique.

Pour plus d’information, visitez www.naturemedic.ca