André-Philippe Gagnon

Les « voix » du succès !

Il était une fois, à Loretteville, un quartier de Québec, un petit garçon qui avait un don bien particulier. Le petit bonhomme pouvait reproduire avec sa voix, les sons qu’il entendait.

Et parce qu’il avait le désir constant de faire rire les gens, ce don est vite devenu un outil pour arriver à ses fins. C’est en imitant Tweety Bird (Bugs Bunny Show) et les rires que cela provoquait dans son entourage que le bambin a réalisé qu’il détenait grâce ce don, la solution.

Avec cet outil en main (pour ne pas dire en bouche), le garçon devient très populaire dans son entourage. On lui demande sans cesse de faire parler Tweety Bird ou autres personnages, comme le font, entre autres, ses coéquipiers dans son équipe de hockey pee-wee. Ils ont un plaisir fou à entendre, par la bouche du jeune Gagnon, leurs instructeurs s’adresser à eux dans le vestiaire après les matches. Même les parents se bidonnent. Puis ce sera chez les Scouts alors que ses espiègleries dérideront les cheftaines, et aussi en classe, devant les copains et les profs!

Au secondaire également alors que les « toughs » de l’école laissent de côté les gros bras devant Gagnon préférant nettement entendre ses blagues.

Plus il avance en âge, plus il raffine ce don, et plus il prend de l’assurance, si bien qu’un jour, le petit garçon de Loretteville devient une star internationale. Il devient, André-Philippe Gagnon!

De Michel Jasmin à Johny Carson

Mais c’est qu’il en a coulé de l’eau sous les ponts entre l’école et sa consécration ! Ça ne s’est pas fait du jour au lendemain.

Maintenant étudiant de deuxième année en traduction au Cégep de Limoilou, André-Philippe se voit contraint de mettre ses études sur pause, le temps que dure la grève des enseignants. Son statut passe alors d’étudiant à vendeur de chaussures à temps partiel, une liberté qui lui permet de peaufiner son art et de participer en 1981 au Concours provincial des jeunes talents qu’anime l’ex des Baronets, Jean Beaulne. Gagnant du concours, on l’invite à l’émission télévisée de Michel Jasmin dont la cote d’écoute dépasse les deux millions.

« Après ça été fou, raconte Gagnon. La station de radio CJRP m’offre un contrat, ensuite l’extraordinaire Denise Filiatrault me demande d’apparaître dans sa série télévisée Chez Denise, puis le gérant d’artiste Pierre Gravel m’enrôle dans son écurie. Ça n’arrête pas ».

Et voilà qu’il se retrouve en 1983 aux Lundis des Ha! Ha!. Un passage qui propulse sa carrière. Ce fut ensuite les Festival Juste pour rire où il interprète We Are the World et les 18 voix. Sans doute sa plus célèbre imitation et qui lui vaut un ticket pour l’émission télévisée The Tonight Show animée par l’illustre Johnny Carson et regardée par plus de 10 millions de personnes.

« Quelle magnifique expérience, se souvient l’artiste. Avant que ne commence l’émission, Johnny Carson était venu me voir dans ma loge, chose qu’il ne faisait que très rarement m’a-t-on dit. Johnny Carson m’a regardé droit dans les yeux et m’a lancé: « Don’t be nervous. Have fun! »

« J’ai fait quelques imitations dont bien sûr We are the World à la suite de quoi je m’apprêtais à quitter le plateau lorsque le régisseur m’a fait signe d’aller m’asseoir aux côtés de l’animateur qui m’a ensuite interviewé. Ce fut un moment magique. Ce 13 novembre 1985 constitue l’un de mes plus beaux souvenirs… »

Cette prestation a des échos jusqu’en Europe et le jeune homme de 24 ans se retrouve aux Victoires de la musique l’équivalent français des Grammy aux États-Unis ou du Gala de l’ADISQ chez nous. Il y interprète encore le fameux tube, mais cette fois devant l’auteur de la chanson, Lionel Richie. Ce dernier dira après l’avoir entendu : « La prochaine fois qu’on fera une chanson comme ça, on n’aura qu’une personne à appeler… »

Les portes du showbiz international sont maintenant toutes grandes ouvertes. De 1985 à 1999, André-Philippe Gagnon est en tournée mondiale. Il monte sur les scènes d’Europe, d’Afrique du Nord (Maroc), des États-Unis et bien sûr du Canada. Plus de 400 000 billets vendus d’ailleurs pour son spectacle au St-Denis. En 1998 et 1999, il part en tournée assurant la première partie du spectacle de Céline Dion, Let’s Talk About Love. C’est la gloire!

Mais la gloire impose à l’artiste un très lourd sacrifice. « Chaque fois que je partais en tournée, avant de quitter la maison, j’embrassais et serrais très fort Camille et Jules, mes deux enfants encore très jeunes à l’époque. Les quitter pour plusieurs semaines m’était insupportable. À toutes les fois, je vivais un déchirement atroce, » confie Gagnon.

Désirant avoir une vraie vie de famille, le papa décide en 1999 de s’établir à demeure à Las Vegas où il était avantageusement connu depuis qu’il s’y était produit en première de la grande Céline. Il a des contrats longue durée dans les plus célèbres casinos : The Venetian, Bally’s et Paris. « Ma nouvelle vie était fantastique. À tous les jours avant de partir, je racontais une histoire aux enfants et j’étais heureux et soulagé de pouvoir leur dire, À demain ! »

André-Philippe ne reprendra ses tournées que plusieurs années plus tard, entre autres, avec Céline Dion une fois encore (en 2016). Il vit maintenant au Québec (Île-des-Sœurs) et n’attend plus que passe la pandémie pour y présenter son tout nouveau spectacle, Je suis André-Philippe Gagnon, reporté en 2021. Un spectacle fort différent des autres qu’il qualifie « de plus mature » et qui a demandé plusieurs mois de préparation. Il y aura cinq musiciens, des effets spéciaux et plusieurs nouvelles voix… et sons.  Évidemment les grands classiques comme le saxophone reviendront. « Mais il y aura aussi de nouvelles imitations d’instruments de musique, » précise le célèbre imitateur.

Mais en attendant, l’imitateur ne chôme pas. Il offre des spectacles corporatifs retransmis sur écran en salle. « Souvent ce sont des entreprises qui désirent remercier leur personnel; une sorte de gala. C’est une formule vraiment le fun, ajoute l’homme aux 400 voix. C’est interactif et ça m’amuse autant que le public. Imaginez Frank Sinatra remercier les employés d’une entreprise pour leur dévouement, ou Stevie Wonder chanter bon anniversaire à l’un d’eux ou encore Julien Clerc, Serge Savard ou autres dans un sketch avec le boss de l’entreprise… Chaque fois, on en rit un bon coup. »