Condamnée par son médecin, il y 17 ans, à ne plus jamais s’adonner à la course à pied, Josée Prévost a parcouru, depuis ce temps, plus de 35 000 kilomètres, participé à 66 marathons (dont des ultra marathons), ouvert deux boutiques spécialisées et aidé des dizaines de milliers de personnes à s’initier à cette discipline.   

Terminé !

Josée Prévost avait 40 ans en 2005 quand un accident de ski l’a forcé à subir une opération au genou.

Elle faisait alors de la course à pied depuis six ans, avait complété deux marathons et se préparait à participer au prestigieux Marathon de Boston.

« Le médecin m’a dit qu’il serait obligé de m’opérer et que mes genoux étaient en mauvais état. Il m’a dit : ‘on va vous opérer, mais vous ne courrez plus jamais’ ».

C’était mal connaître la principale intéressée.

 

 

« Je l’ai accepté pendant quelques années. Je n’ai pas couru pendant quatre ans. J’ai décidé de retourner aux études en kinésiologie (à l’Université de Sherbrooke). À force de faire les cours, j’ai réalisé qu’il y avait peut-être moyen de courir quand même. Que j’allais essayer une méthode inspirée par ce que j’apprenais à l’université. J’ai recommencé doucement et j’ai été capable de faire quelques minutes. De jour en jour, je faisais quelques minutes de plus. Après un an, j’ai été capable de faire le marathon d’Ottawa. À 40 ans, en course à pied, on est fort. On est bon. Je n’ai pas essayé de le faire vite, mais je l’ai bien fait » raconte Mme Prévost.

Elle ajoute, fièrement :

« À partir de là, je n’ai jamais arrêté de courir, je n’ai jamais eu de problème avec mon genou. J’ai couru depuis mon opération un bon 35 000 kilomètres ». Avant son opération « Le médecin me disait que mes genoux étaient usés d’arthrose. J’avais souvent des douleurs. La raison, c’est que je ne courrais pas bien. Les gens qui courent seuls pensent que courir, c’est aller vite et que pour être bon à la course, il faut être vites. La course à pied, on considère ça comme un sport de performance, alors que c’est tout autre chose… »

Sa propre boutique

À la réussite au marathon d’Ottawa s’est ajoutée une révélation.

« Je me suis dit : là ça vient de clore le fait que je veux travailler dans la course à pied. J’ai discuté avec mon conjoint et j’ai dit, j’aimerais ça prendre tous nos sous pour ouvrir une boutique. En 2012, on a ouvert la Maison de la Course à Mont Saint-Hilaire (une autre est venue s’ajouter à Sainte-Thérèse en 2015). On y sert autant les débutants que les experts (coureurs plus avancés), mais on porte beaucoup d’attention aux débutants qui, s’ils font les choses seuls au départ, ont 90 % des chances de s’enfarger. Ils vont considérer que la course à pied ce n’est pas fait pour eux, alors que c’est tout à fait faux ».

Pandémie

Cette même attention pour les coureurs qui commencent à découvrir ce sport était déjà présente en 2012 au moment de l’ouverture de la boutique alors que, précise Josée, « dès la première semaine, on a offert des cours pour les débutants. On a eu entre 100 et 125 participants qui, un an plus tard, participaient à des épreuves de toutes sortes (du 5 km au marathon) ».

Cette façon de faire s’est répétée dans l’initiative de Josée d’offrir de la formation en course à pied sur le Web au coeur de la pandémie.

Les quatre programmes (de débutant à avancé) ont été lancés en avril 2020. Les formations s’étalent chacune sur dix semaines et celle destinée aux débutants est gratuite.  Plus de 13 000 personnes y participent avec une moyenne de 500 nouvelles inscriptions par mois pour le cours de débutant. La majorité des gens inscrits proviennent du Québec, mais on en retrouve également de Toronto et, même, de la Belgique, ainsi que des francophones établis à New-York et dans l’ouest canadien.

Élément intéressant, au terme de la formation Course 101 (débutant), on offre un défi 4 km, au cours duquel les participants sont accompagnés pendant 45 minutes (via un enregistrement audio reproduit dans leurs écouteurs) par Josée et le comédien-ultra marathonien Patrice Godin. Les autres formations offertes sont (comme celle des débutants) sous forme de vidéos et comportent, elles aussi des défis, au terme de la session. Elles sont chacune adaptées au niveau des coureurs.

Conscience corporelle

En outre, Josée parle d’avoir, en course à pied, une « conscience corporelle »: « Il faut que les coureurs soient conscients de ce que leur corps est en train de faire. C’est motivant, parce qu’ils savent qu’ils font la bonne chose. Si tu ne vois pas ta progression, tu vas lâcher. Tu me peux pas entreprendre quelque chose si tu ne penses pas qu’à la fin tu vas avoir un succès ».

Une vengeance

Par ailleurs, question de prouver que Josée carbure à l’émotion et à la motivation, il faut savoir qu’elle est née prématurément au moment où sa mère faisait un arrêt cardiaque (c’était, à 38 ans, son troisième en peu d’années, attribuable, selon Josée Prévost, à de mauvaises  habitudes de vie largement répandues à cette époque et relatives au tabac, l’alcool et une alimentation riche en gras ).

Sa mère est par la suite décédée alors que Josée n’avait que 10 ans.

« Quand je vois un parent en forme qui fait du sport avec ses enfants. Si cette personne-là je l’ai aidée à embarquer dans une vie active et à prendre soin de son corps, pour moi c’est une vengeance. À mes yeux, je permets à des petites filles de ne pas perdre leur maman à 10 ans ». Cette implication, « je vais la faire toute ma vie. Je n’arrêterai jamais » promet Josée.

Voyez l’article original du magazine: